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Réflexion sur les notions de cessation des paiements, d’illiquidité et d’insolvabilité au regard du droit communautaire OHADA

En vertu de l’article 1-3 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, la cessation des paiements est « l'état où le débiteur se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible ».

Ledit acte uniforme prévoit des mesures de prévention, de sauvetage et de réalisation de l’actif de l’entreprise débitrice à adapter en fonction de sa situation financière. A ce titre, nous retrouvons :

-            La conciliation : une procédure préventive, consensuelle et confidentielle, destinée à éviter la cessation des paiements de l'entreprise débitrice afin d'effectuer, en tout ou partie, sa restructuration financière ou opérationnelle pour la sauvegarder. Cette restructuration s'effectue par le biais de négociations privées et de la conclusion d'un accord de conciliation négocié entre le débiteur et ses créanciers ou, au moins ses principaux créanciers, grâce à l'appui d'un tiers neutre, impartial et indépendant dit conciliateur ;

-            Le règlement préventif : une procédure collective préventive destinée à éviter la cessation des paiements de l'entreprise débitrice et à permettre l'apurement de son passif au moyen d'un concordat préventif ;

-            Le redressement judiciaire : une procédure collective destinée au sauvetage de l'entreprise débitrice en cessation des paiements mais dont la situation n'est pas irrémédiablement compromise, et à l'apurement de son passif au moyen d'un concordat de redressement ;

-            La liquidation des biens : une procédure collective destinée à la réalisation de l'actif de l'entreprise débitrice en cessation des paiements dont la situation est irrémédiablement compromise, pour apurer son passif.

Toutes ces techniques de redressement ont pour but d’assurer le sauvetage de tout ou partie de l’entreprise en difficultés, d’en pérenniser l’exploitation et de maintenir les emplois qui y sont attachés, mais aussi de désintéresser dans la mesure du possible les créanciers.  

Par ailleurs, la définition de la cessation des paiements fait ressortir les notions d’actif disponible et de passif exigible. En effet, d’une part, « L’actif disponible, est la trésorerie de l’entreprise. Il comprend les sommes dont l’entreprise peut disposer immédiatement soit parce qu’elles sont liquides, soit parce que leurs conversions en liquide est possible à tout moment et sans délai : caisse, solde créditeur des comptes bancaires, effets de commerces ou valeurs mobilières encaissables à vue, etc. » (Y. Guyon, Droit des affaires. Tome 2, entreprises en difficultés, redressement judiciaire, faillite, Coll. « Droit des affaires et de l'entreprise », Paris, Economica) et d’autre part, le passif exigible représente toutes les dettes, à court, moyen ou long terme, arrivées à échéance.

A côté de cette notion essentielle, nous retrouvons des notions voisines qu’il convient de distinguer. Il s’agit des notions d’illiquidité et d’insolvabilité.

A.    Définition des notions connexes et distinction

L'illiquidité fait référence à une pénurie de liquidité. Elle désigne l’incapacité d’une personne physique ou morale à honorer ses engagements à court terme.

L'insolvabilité, en revanche, désigne l’état d’une personne physique ou morale qui se trouve dans l’incapacité de payer l’ensemble de ses dettes à court ou à long terme due à une insuffisance d'actif. Cette notion reflète une situation structurelle où le passif total est supérieur à l’actif total.

A travers ces définitions simplifiées, il faudrait retenir que la cessation des paiements représente l’état avancée de l’illiquidité dans la mesure où, sans pouvoir disposer de fonds à court terme (illiquidité), l'entreprise sera forcément dans l'incapacité de rembourser ses dettes arrivées à échéances (cessation des paiements). La cessation des paiements est donc la conséquence d’une illiquidité avérée.

Tandis que, la solvabilité diffère de la cessation de paiement en ce que, tout dépend de ce qui constitue l'actif disponible et le passif exigible. En effet, l’actif disponible étant cet actif numéraire ou immédiatement convertible en argent, les immobilisations n’y sont pas contenues. Ainsi, si une entreprise a de grosses immobilisations, elle aura un actif élevé du fait de l’importance de ce poste. Elle pourra donc être considéré comme solvable (actif > passif) mais peut se retrouver en état de cessation des paiements si son actif circulant immédiatement convertissable en liquidité et sa trésorerie ne permettent pas de combler ses dettes devenues exigibles.

Inversement, dans le cas d'une entreprise qui a de grosses dettes à long terme, ceci augmentera alors considérablement son passif. Cette entreprise peut se trouver être insolvable en raison de ce que son actif serait inférieur à son passif. Quand même, elle pourra être en mesure de rembourser ses créanciers à court terme si son actif disponible permet de régler son passif exigible.

B.    Illustration : Exemple de bilan hyper simplifié Actif/ Passif

 

Total Actif : 15 000 000 F cfa

Avec actif disponible (actif circulant immédiatement convertissable + trésorerie) : 5 000 000 F cfa

Total Passif : 10 000 000 F cfa

Avec passif exigible : 7 500 000 F cfa

Dans cet exemple, il n’y a pas d’insolvabilité puisque le total des actifs couvre aisément celui du passif. L’entreprise est donc solvable.

Par contre, il y a cessation des paiements en raison du manque de liquidité disponible pour couvrir les dettes devenues exigibles. A défaut de bénéficier de temps pour convertir le reste de ses actifs en liquidité afin de combler le gap, la société se trouvant dans un tel cas ne pourra pas honorer ses engagements envers ses créanciers.


Pour conclure à ce sujet, nous retiendrons juste que la distinction entre ces 3 notions est essentielle afin de cerner au mieux la situation financière d’une entreprise et en faire un diagnostic dans le but de proposer des solutions de redressements adéquates.

 

Bibliographie

1. Acte uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif adopté le 10 Septembre 2015 à Grand Bassam (Côte d’Ivoire) ;

2. SAWADOGO (F.M.), « Cessation des paiements », in Encyclopédie du droit OHADA, (dir.) POUGOUÉ (P.-G.), éd. Lamy, 2011 ; 

3. GUYON (Y.), « Droit des affaires. Tome 2, entreprises en difficultés, redressement judiciaire, faillite » Coll. « Droit des affaires et de l'entreprise », Paris, Economica, 9e ed., 2003

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